Embarcadère


Sur le pont sont allés tous les fumeurs et ceux qui veulent prendre l’air dans la figure, et pour scruter les rives, y voir un cabanon, y deviner à l’arrière les méandres les forêts les boues les volatiles. Plus de colis que de voyageurs. À remous, lourdement, le ferry glisse d’avant en arrière pour approcher son flanc de l’embarcadère. Le pont est abaissé, l’attente et le calme, la suspension s’éparpille dans la précipitation et le poids des paquets. Là sur la rive s’est formé un arc de cercle irrégulier, lui repère les touristes, déroule les bonjours des langues, elle aussi, plus discrète, efficace, la pêche à la ligne et non le filet. On propose un lit, une douche, on propose un prix. On les voit tout de suite, eux, les étrangers, les couleurs des vêtements, le neuf, les sacs à dos, ou la valise, la peau lisse, hydratée, les rides aussi pas les mêmes. À attendre, il y aussi elle, la peau plus mate et une grande jupe colorée, elle est venue là par d’autres moyens, elle vend des pastèques, ou du pain, ou des tomates, et des serviettes de bain. Elle est dans un autre rythme, elle est là pour quelques heures seulement, et les autres passent leur regard à travers elle.